A l'approche de Noël, les Japonais (et les Japonaises en particulier) déboursent des millions de Yen, envahissent les magasins pour le plus grand bonheur des multinationales. Le géants européens en particulier se frottent les mains: Louis Vuitton, Chanel, Godiva et pleins d'autres. La folie consumériste des Japonais, la pression sociale et un marketing mensonger et ravageur ont fait du Japon et de ses traditions un ersatz de culture européano-asitatique post-moderne. Rendez vous compte: les multinationales chocolatières ont réussi à faire croire aux petites demoiselles que la tradition de la Saint-Valentin veut que les femmes donnent des chocolats à tous les mâles qui les environnent. Que ce soit au lycée ou sur leur lieu de travail, le femmes doivent distribuer de petites tablettes hors de prix à tous les mâles lascifs et lubriques qui les oppriment. La contrepartie masculine de la Saint-Valentin à la japonaise s'appelle le White Day, autre invention sortie de nulle part (les multinationales ont non seulement réussi à importer des fêtes et à les transformer à leur avantage, mais elles sont également parvenues à créer des fêtes de toutes pièces). Les hommes doivent à leur tour distibuer les pépites, mais étant donné la nature fainéante et machiste du mâle japonais, cette tradition fera probablement long feu.
Pour en revenir à Noël, les multinationales européennes, garante du bon goût et créatrices de nouvelles traditions onéreuses, ont également réussi à importer Noël au Japon. Un Noël mutant. Noël est une fête pour les couples au Japon. La tradition (qui remonte à, disons, 2002) veut que les couples se rendent au restaurant et s'offrent des cadeaux. Une autre fête consumériste. Bon, c'est mignon, objecterez-vous. Et je ne vais pas vous donner tort. Il est toujours plus sympathique de passer un Noël en escortant une charmante donzelle japonaise que de parler politique à moitié bourré et de danser la queue-leuleu. Et l'esprit de Noël ne représente pas grand chose pour moi non plus. Mais ce que je trouve effrayant avec Noël au Japon, c'est que des multinationales fabriquent des traditions de toutes pièces. Nous savons tous que le capitalisme est basé sur la création de nouveaux besoins, mais dans le cas des fêtes de fin d'années et de la Saint-Valentin, la création de nouveaux besoins s'accompagnent d'une auto-destruction culturelle difficile à imaginer. C'est pourquoi, si vous voulez découvrir le coeur même de la culture japonaise, je ne recommenderai jamais Kyoto, mais Disneyland. Une telle prédation de la part des multinationales occidentales ravagent le Japon depuis quelques années et également l'Asie.
Qu'en pensent les Chrétiens japonais? Rien. J'ai rencontré quelques Chrétiens, et la plupart d'entre eux fêtent Noël en couple.
Je ne suis pas du tout en train de défendre l'esprit de Noël ou la Chrétienté. Je suis un Tengu, a godless killing machine. Je suis juste un peu inquiet de voir à quel point certaines entreprises ont réussi à anihiler des pans entiers d'une culture millénaire pour les remplacer par l'adoration de Mickey et de Pluto.
Cepedant, il y a pire. Pendant la période de Noël, des pancartes jaunes essaiment aux quatre coins de la capitale: Ginza, Shibuya, Shinjuku, tous les grands quartiers sont envahis par de curieux messagers, habillés comme des pécheurs. Ils portent des haut-parleurs, qui diffusent une litanie lente et glauque. Ce sont des évangélistes, ou des pentecôtistes, ou des adventistes, ou je ne sais quelle troupe de grenouilles de benitiers superstieuses casse-bonbons. Ils ne sont pas Japonais: ils sont Coréens pour la plupart (les Chrétiens de Corée comptent parmi les plus virulents et prosélytes) et militent pour une sombre association, dont je n'ai malheureusement pas pu obtenir le nom. Les messages crachés par leur haut-parleur indiquent aux passants "qu'il n'y a pas de salut en dehors du Christ", leur pancarte indiquent la même chose.
Les Japonais ne sont pas religieux. Ils croient en beaucoup de choses, et même s'ils sont parfois impressionnables et crédules, la plupart d'entre eux se méfient de la religion comme quelques chose qui divise, quelque chose de fondamentalement étranger et insoluble; bienvenu sur les terres de Wa (和, Japon, harmonie, paix, équilibre). L'identité japonaise est unique; les Japonais descendent d'un autre primate, ils ne sont pas connecté au monde extérieur et sont culturellement si uniques, tellement uniques et "tellement plus uniques que les autres nations" (cf, Satoshi Tominaga, et voir les études basée sur le Nihonjin-ron 日本人論), que la Chrétienté ne conquerra pas le Japon.
Les évangélistes ne font pas recette. Mais Saint Louis Vuitton, l'Église Armani et les osties Godiva ont bati des églises sur tous les territoires et ne s'en iront probablement jamais.